L’Affeux-Jojo fait son malin
Scrogn | 17 août 2015Nos deux aînés font partie des cadets de l’air, un mouvement pour les jeunes, encadré par des militaires, où la discipline, la camaraderie et le dépassement de soi prônent. En gros, c’est comme les scouts mais en mieux.
Je vous vois déjà derrière vos écrans. Je ne veux pas démarrer une polémique mais ayant moi-même fait l’expérience des deux mouvements chez nous au Canada, je comprends l’engouement des affreux et le respecte hautement. Parce que ce qu’ils vivent est rare. Parce que la qualité des activités est incroyable. Parce que les découvertes qu’ils y font sont exceptionnelles. Parce qu’ils apprennent à vivre en société en honorant des règles de respect envers les autres. Parce que les amitiés qu’ils y nouent sont précieuses. Parce que la bouffe semble y être dégueulasse.
Et surtout parce que j’arrive à me débarrasser de certains de mes rejetons durant l’été en sachant qu’ils seront heureux.
Heureux d’y aller.
Heureux d’être loin de leur maison…
Heureux d’être loin de leur maman…
Bouhouhouhou….
Très gros bouhouhou…
Mais heureux de revenir (c.f. la bouffe)
Mais avant leur départ, avec tout leur bonheur, comme cela ne suffisait pas, l’un des rejetons a piétiné mon chagrin avec joie.
Ainsi, après m’être levée à quatre heures et demi du matin avec Guinness, un dimanche, l’un pour amener à la base militaire du départ, moi pour l’embrasser une dernière fois avant son périple (et nous recoucher ensuite), je n’avais pas soupçonné que l’Affreux-Jojo m’avait réservé cette horreur.
Car le bougre (12 ans et 1,73 mètre au compteur) nous avait écrit un petit mot, laissé avec désinvolture sur la table du salon. Je vous le retranscris fidèlement ci-dessous :
« Cher Mamen, Pappa (s’en suivent les prénoms massacrés de ses frères et des bestioles) et ètre inférieur, vou me manké déjà é je vou souhète bonn chansse penden mon absansse. »
Mon cœur et mes yeux ont saigné. J’avais la preuve écrite que j’avais échoué dans ma croisade contre les grossières fautes d’orthographe. Je m’arrachais la peau des joues avec les griffes du désespoir lorsque Guinness m’a demandé de tourner la feuille de papier.
Et j’ai découvert ce post-scriptum :
« J’ai fait beaucoup de fautes EXPRÈS pour que Maman puisse me le reprocher et me punir. Mais comme je ne suis plus là, j’échappe aux sanctions. Je suis diabolique. «
Nous avons récupéré nos grands affreux plusieurs jours plus tard avec soulagement (le lave-vaisselle et les litières des chats débordaient) en soirée. Nous les avons embrassés avec tendresse. Épuisés comme ils étaient, ils se sont couchés assez tôt.
L’Affreux-Jojo a dû avoir un sommeil agité. Car il a retrouvé son mot de départ sur son oreiller, avec un petit rajout écrit en rouge sang :
« Maman, pour une fois, sera patiente et attendra sagement ton retour. À demain, pour les châtiments amplement réfléchis et choisis avec minutie. Alors, qui est diabolique ? «
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